Le Coffret
Assez souvent on s’imagine
Devoir chercher, peiner longtemps,
Quand il suffit que l’on devine
Et qu’on s’y prenne simplement.
Quelqu’un reçut un jour, fait d’une main de maître,
Un coffret qu’aussitôt tout le monde admira.
Quel fini ! Mais voilà qu’en la pièce pénètre
Un Sage de la Mécanique. Il s’exclama :
« Il n’a pas de serrure,
C’est que là vous avez un coffret à secret.
Mais, bonnes gens, soyez en sûrs,
Ce secret je l’aurai, j’ouvrirai le coffret :
En mécanique je suis fort. Me voici prêt.
Ne riez pas ainsi sous cape. »
Et donc il s’attaque au coffret,
Le prend, le retourne, le tâte,
S’énerve dans sa hâte :
Il appuit sur un clou, un autre et puis sur quoi ?
Une poignée peut-être.
xxx x xxx
Les gens chuchotent, rient entre eux, hochent la tête,
Avec des « pas là », « pas comme ça » !
Et l’Homme de la Mécanique y met sa science,
Toute sa science et s’acharne et transpire. Ah ! vrai,
Il n’en peut plus, il perd patience,
Il abandonne le coffret,
Sans trouver à l’ouvrir en dépit de son zèle :
Car le coffret s’ouvrait de façon naturelle. La poésie russe, édition bilingue par Elsa Triolet, Seghers, Paris, 1971, tome II