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segunda-feira, maio 30, 2005

Alicerçando Palavras # 70 - Jorge Luís Borges


[...]Quando o fim se aproxima, já não restam imagens da lembrança; só restam palavras. Não é estranho que o tempo tenha confundido aquelas que alguma vez me representaram com aquelas que foram símbolos da sorte de quem me acompanhou, por tantos séculos. Eu fui Homero; em breve serei Ninguém, como Ulisses; em breve, serei todos: estarei morto.[...]


Jorge Luís Borges, O Aleph, O Imortal, Editorial Estampa, 1993



sexta-feira, maio 27, 2005

Alicerçando Palavras # 69 - Shirin Ebadi


Vivre dans un monde sans violence est un droit pour chaque être humain. Vivre en paix est un droit élémentaire et fondamental. Sans paix, les autres droits tels que le droit à la connaissance ou à la liberté d'expression perdent toute signification. Or une paix stable et durable ne peut se construire que sur deux piliers: la justice et la démocratie. Sans justice et sans démocratie, l'absence de contestation ne signifie rien d'autre que la suffocation. Le silence des populations est celui d'une société tyrannisée, dans laquelle personne n'ose élever la voix ou exprimer son opposition, de peur d'être emprisonné ou d'être tué. C'est un silence de cimetière qui, à plus ou moins long terme, engendrera inévitablement la révolte. N'oublions pas le silence qui a régné pendant 70 ans en Union soviétique. Ce silence-là est toujours en vigueur dans de grandes parties du monde.
La justice tout d'abord. Celle-ci n'est pas un concept ou un phénomène statique. La justice est comme un être humain qui croît et évolue dans le temps et dans l'espace, au fur et à mesure des mutations de civilisation. N'oublions pas que, il y a deux cents ans, l'esclavage était autorisé. Battre un esclave n'était pas injuste. Au XVIIIe siècle, bannir une femme de la société et la confiner dans un coin de sa cuisine était un fait normal. Les femmes n'avaient pas le droit de sortir de chez elles sans leurs conjoints. Cela peut-il encore être accepté au XXIe siècle? Pouvons-nous tolérer que les personnes âgées, comme cela est le cas dans certaines tribus, soient abandonnées lorsqu'elles ne peuvent plus subvenir à leurs besoins ou lorsque la maladie les rend impotentes? Il est évident que non. La justice est aussi le fruit du progrès des sciences. Elle évolue de pair avec nos sociétés.
Cette exigence de justice rencontre évidemment des obstacles. La difficulté survient lorsque des groupes ultra-conservateurs se replient sur les traditions, ferment les yeux sur l'évolution mondiale et jugent ces métamorphoses imaginaires. Ceux-là, imprégnés de traditions désuètes, refusent de réexaminer leurs critères de valeurs et persistent à regarder le monde avec les yeux de leurs ancêtres. Ils prétendent résoudre les difficultés d'aujourd'hui avec le savoir d'hier et interprètent la justice en fonction de celui-ci. C'est une grande erreur. Elle les égare dans une impasse. Ces gens-là croient qu'ils ont parfaitement raison. Ils combattent toute forme d'idées nouvelles sous prétexte d'invasion culturelle alors qu'ils refusent tout simplement ceux qui s'opposent à leurs pensées et sont prêts à étouffer par la force des armes les voix de la contestation. Ces gens sont épris d'un silence de mort. Un silence de cimetière. Mais ils ont une faiblesse: dès que leur pouvoir se fissure, même les gens qui ne peuvent plus respirer se révoltent.
L'autre pilier de la paix est la démocratie. Une paix qui n'est pas basée sur la démocratie ne peut pas durer. De même qu'une paix imposée par un pouvoir dominant à un peuple opprimé. Une paix imposée par un gouvernement victorieux à un État vaincu ne peut pas perdurer. Car dès que l'État vaincu se sentira un peu plus fort et jugera possible de faire face, sa réponse sera immédiatement violente.
La même règle est valable à l'intérieur des pays. Si la démocratie ne règne pas dans une société, le pouvoir est à chaque moment menacé de s'effondrer. N'oublions pas ce temps où l'ex-Union soviétique rivalisait avec les États-Unis et étendait son ombre tyrannique sur une bonne partie du monde. Il n'y avait pas de démocratie à l'intérieur et son pouvoir a fini par fondre comme neige au soleil. L'implosion de l'URSS était prévisible.
La nouveauté de notre époque de mondialisation est l'interconnexion des sociétés. Les liens culturels, politiques et commerciaux se multiplient. Il n'est, dès lors, plus concevable que la paix civile soit l'apanage de quelques privilégiés. Ceux-ci ne doivent pas se faire d'illusions: ils ne peuvent pas construire une île-forteresse de sécurité et de justice alors que le reste du monde voit ses droits bafoués, subit l'humiliation et assiste à l'émiettement de sa dignité. Il est certain que le tourbillon submergera un jour cette île de quiétude, anéantissant son calme et sa sécurité. Nous sommes aujourd'hui les témoins d'un monde où le destin de tous les êtres humains s'entremêle. Si dans un coin de la planète une puissance attaque un pays, la sécurité du reste de la planète sera menacée. Si dans une partie du monde commence une guerre, celle-ci se propagera sous d'autres formes ailleurs et des innocents, parfois même des pacifistes, seront victimes de la violence des terroristes. Malheureusement, ou peut-être heureusement, la mondialisation a rendu mondiale la propagation de la guerre et de la paix.
Même ceux qui ne vivent pas dans les affres d'un conflit doivent donc se sentir concernés. Nous devons chacun combattre la violence, même si celle-ci ne nous touche pas directement. C'est ainsi que peut naître la notion d'une compréhension universelle. C'est ainsi que les violations des droits humains pourront être éradiquées. Vous, Européens, ne devez pas rester indifférents lorsque les droits humains sont bafoués en Afghanistan, en Iran, en Irak, en Palestine ou n'importe où dans le monde. Nous sommes tous dans le même bateau. Si une parcelle de cette embarcation se détériore, si un trou dans la coque apparaît, notre navire ne pourra plus poursuivre sa route. Il n'est pas possible qu'une partie de l'humanité s'approprie les bienfaits du monde pour soi et continue d'en priver les autres. La seule voie vers un monde plus juste est de faire preuve de bienveillance. Car la bienveillance est, en chacun d'entre nous, une ressource inépuisable.


Shirin Ebadi, avocate iranienne, Prix Nobel de la paix 2003. Traduction: Mina Buchs, avec la collaboration de Richard Werly



quinta-feira, maio 26, 2005

Alicerçando Imagens # 51 - Jean-Michel Basquiat 1960-1988



Future Science Versus Man, 1983


quarta-feira, maio 25, 2005

Alicerçando Poesia # 86 - Jacques Prévert


Promenade de Picasso
Sur une assiette bien ronde en porcelaine réelle
une pomme pose
Face à face avec elle
un peintre de la réalité
essaie vainement de peindre
la pomme telle qu'elle est
mais
elle ne se laisse pas faire
la pomme
elle a son mot à dire
et plusieurs tours dans son sac de pomme
la pomme
et la voilà qui tourne
dans une assiette réelle
sournoisement sur elle-même
doucement sans bouger
et comme un duc de Guise qui se déguise en bec de gaz
parce qu'on veut malgré lui lui tirer le portrait
la pomme se déguise en beau bruit déguisé
et c'est alors
que le peintre de la réalité
commence à réaliser
que toutes les apparences de la pomme sont contre lui
et
comme le malheureux indigent
comme le pauvre nécessiteux qui se trouve soudain à la merci
de n'importe quelle association bienfaisante et charitable
et redoutable de bienfaisance de charité et de redoutabilité
le malheureux peintre de la réalité
se trouve soudain alors être la triste proie
d'une innombrable foule d'associations d'idées
Et la pomme en tournant évoque le pommier
le Paradis terrestre et Ève et puis Adam
l'arrosoir l'espalier Parmentier l'escalier
le Canada les Hespérides la Normandie la Reinette et l'Api
le serpent du Jeu de Paume le serment du Jus de Pomme
et le péché originel
et les origines de l'art
et la Suisse avec Guillaume Tell
et même Isaac Newton
plusieurs fois primé à l'Exposition de la Gravitation Universelle
et le peintre étourdi perd de vue son modèle
et s'endort
C'est alors que Picasso
qui passait par là comme il passe partout
chaque jour comme chez lui
voit la pomme et l'assiette et le peintre endormi
Quelle idée de peindre une pomme
dit Picasso
et Picasso mange la pomme
et la pomme lui dit Merci
et Picasso casse l'assiette
et s'en va en souriant
et le peintre arraché à ses songes
comme une dent
se retrouve tout seul devant sa toile inachevée
avec au beau milieu de sa vaisselle brisée
les terrifiants pépins de la réalité.


Jacques Prévert, Paroles, Gallimard, 1949



terça-feira, maio 24, 2005

Alicerçando Poesia # 85 - Ada Negri - Itália 1870-1945


Multidão



Uma folha tomba do plátano, um frémito sacode o imo do cipreste,
És tu que me chamas.
Olhos invisíveis sulcam a sombra, penetram-me como à parede os pregos,
És tu que me fitas.
Mãos invisíveis nos ombros me tocam, para as águas dormentes do lago me atraem,
És tu que me queres.
De sob as vértebras com pálidos toques ligeiros a loucura sai para o cérebro,
És tu que me penetras.
Não mais os pés pousam na terra, não mais pesa o corpo nos ares, transporta-o a vertigem
obscura

És tu que me atravessas, tu.


segunda-feira, maio 23, 2005

Alicerçando Palavras # 68 - René Descartes


Je me considérais, premièrement, comme ayant un visage, des mains, des bras, et toute cette machine composée d'os et de chair, telle qu'elle paraît en un cadavre, laquelle je désignais par le nom de corps. Je considérais, outre cela, que je me nourrissais, que je marchais, que je sentais et que je pensais, et je rapportais toutes ces actions à l'âme.

René Descartes, Les méditations métaphysiques



domingo, maio 22, 2005

Alicerçando Imagens # 50 - Marien Schouten



Untitled 1992, acrylic paint, varnish and charcoal on linen, steel
183x220cm
De Pont Foundation for Contemporary Art, Netherlands


sábado, maio 21, 2005

Alicerçando Poesia # 84 (cont.) - Ovídio


O que me valeu foi a ajuda da Internet para corresponder ao desafio da Blimunda. Segue-se o texto de Ovídio das Metamorfoses sobre Pigmalião.




Quas quia Pygmalion aevum per crimen agentis
viderat, offensus vitiis, quae plurima menti
femineae natura dedit, sine coniuge caelebs
vivebat thalamique diu consorte carebat.
interea niveum mira feliciter arte
sculpsit ebur formamque dedit, qua femina nasci
nulla potest, operisque sui concepit amorem.
virginis est verae facies, quam vivere credas,
et, si non obstet reverentia, velle moveri:
ars adeo latet arte sua. miratur et haurit
pectore Pygmalion simulati corporis ignes.
saepe manus operi temptantes admovet, an sit
corpus an illud ebur, nec adhuc ebur esse fatetur.
oscula dat reddique putat loquiturque tenetque
et credit tactis digitos insidere membris
et metuit, pressos veniat ne livor in artus,
et modo blanditias adhibet, modo grata puellis
munera fert illi conchas teretesque lapillos
et parvas volucres et flores mille colorum
liliaque pictasque pilas et ab arbore lapsas
Heliadum lacrimas; ornat quoque vestibus artus,
dat digitis gemmas, dat longa monilia collo,
aure leves bacae, redimicula pectore pendent:
cuncta decent; nec nuda minus formosa videtur.
conlocat hanc stratis concha Sidonide tinctis
adpellatque tori sociam adclinataque colla
mollibus in plumis, tamquam sensura, reponit.
'Festa dies Veneris tota celeberrima Cypro
venerat, et pandis inductae cornibus aurum
conciderant ictae nivea cervice iuvencae,
turaque fumabant, cum munere functus ad aras
constitit et timide "si, di, dare cuncta potestis,
sit coniunx, opto," non ausus "eburnea virgo"
dicere, Pygmalion "similis mea" dixit "eburnae."
sensit, ut ipsa suis aderat Venus aurea festis,
vota quid illa velint et, amici numinis omen,
flamma ter accensa est apicemque per aera duxit.
ut rediit, simulacra suae petit ille puellae
incumbensque toro dedit oscula: visa tepere est;
admovet os iterum, manibus quoque pectora temptat:
temptatum mollescit ebur positoque rigore
subsidit digitis ceditque, ut Hymettia sole
cera remollescit tractataque pollice multas
flectitur in facies ipsoque fit utilis usu.
dum stupet et dubie gaudet fallique veretur,
rursus amans rursusque manu sua vota retractat.
corpus erat! saliunt temptatae pollice venae.
tum vero Paphius plenissima concipit heros
verba, quibus Veneri grates agat, oraque tandem
ore suo non falsa premit, dataque oscula virgo
sensit et erubuit timidumque ad lumina lumen
attollens pariter cum caelo vidit amantem.
coniugio, quod fecit, adest dea, iamque coactis
cornibus in plenum noviens lunaribus orbem
illa Paphon genuit, de qua tenet insula nomen.


sexta-feira, maio 20, 2005

Alicerçando Poesia # 84 - Ovídio



Fable IX

Pygmalion amoureux de sa statue

Lorsque Pygmalion de ces Filles lubriques
Eut vu dans leur excès les flammes impudiques,
Confus de cette aveugle et brutale fureur,
Il prit pour tout le Sexe une invincible horreur,
Et leur dérèglement lui peignant chaque Femme
Capable de tomber dans ce désordre infâme,
Il voulut vivre libre, et sans faire aucun choix,
Longtemps de l’hyménée il rejeta les lois.
Cependant la Sculpture exerça son adresse.
Dans tout ce que cet Art a de délicatesse,
Il fit une Statue avec des traits si doux
Que l’honneur qu’il en eut lui fit mille jaloux.
De l’ivoire employé la blancheur surprenante
Lui donnait tout l’éclat d’une Fille vivante,
Et parmi le beau Sexe on n’avait jamais vu
Aucun aimable Objet de tant d’attraits pourvu.
D’un Art ingénieux la savante imposture
A su si bien en elle imiter la Nature
Qu’on dirait à ses yeux qu’elle semble rouler,
Que la seule pudeur l’empêche de parler.
De ses rares beautés chacun rend témoignage.
Pygmalion lui-même admire son ouvrage,
Et du plus tendre amour ne se peut garantir
Pour ce qu’il n’a point fait capable d’en sentir.
Il doute quelquefois, malgré ce qu’il doit croire,
Ou si c’est un vrai corps, ou si c’est de l’ivoire,
Et pour s’en éclaircir, il la touche, et dément
Sur ce qu’il a touché son propre sentiment.
Plus charmé chaque jour il trouve en sa Statue
Ce qui flatte les sens, ce qui plaît à la vue,
Et la brûlante ardeur qu’il ne peut apaiser
Le portant à la voir sans cesse, à la baiser,
Telle est la douce erreur où son cœur s’abandonne,
Qu’il croit qu’elle lui rend les baisers qu’il lui donne .
Il lui parle, il l’embrasse, et dans ce vif transport
Il craint de la meurtrir s’il l’embrasse trop fort.
Tantôt, pour satisfaire à l’ardeur qui le presse,
En des termes touchants il lui peint sa tendresse,
Tantôt sa passion, à ses soins complaisants,
Comme pour la gagner, ajoute des présents.
Il choisit ce qui fait l’amusement des Filles,
Lui porte des Oiseaux, lui donne des Coquilles,
Des Perles, des grains d’Ambre, et des plus belles Fleurs
Fait sur elle éclater les brillantes couleurs.
D’un magnifique Habit la galante parure
Orne pendant le jour cette aimable Figure.
Un superbe Collier, dont pour elle il fait choix,
Répond aux Diamants dont il orne ses doigts,
Et les Boucles de prix qu’il met à ses oreilles
Jettent un vif éclat qui les rend sans pareilles.
Chaînes d’or, Nœuds, Rubans, il ne lui manque rien.
Avec des traits finis tout ornement sied bien ;
Mais quoiqu’elle en reçoive une grâce nouvelle,
Quand elle est sans habits, elle n’est pas moins belle.
Il l’appelle sa Femme, et lui fait, loin du bruit,
Dresser un lit pompeux pour y passer la nuit.
Là, dans la folle ardeur du feu qui le consume,
Il la pose, il l’étend sur la plus molle plume,
Comme si par ce soin elle devait sentir
Que d’un repos mal sûr il la veut garantir.
Tandis que cette erreur l’agite et le tourmente,
Il voit venir le jour d’une Fête éclatante,
Où pour rendre à Vénus des honneurs solennels
Toute l’Ile de Cypre est devant les Autels.
L’encens fumait partout, et le sang des Victimes
Intéressait les Dieux pour les vœux légitimes.
Lorsque Pygmalion qui veut se marier,
Songeant à sa Statue, et n’osant les prier
D’employer leur pouvoir à la rendre animée,
« Dieux, dit-il d’une voix timide et mal formée,
Si l’hymen doit remplir mes désirs amoureux,
Comme vous pouvez tout, faites qu’il soit heureux,
Et daignez m’accorder dans ma flamme inquiète
Une Femme semblable à celle que j’ai faite. »
Vénus, qu’à cette Fête où chacun l’adorait
De tant d’honneurs rendus le spectacle attirait,
Pénètre à quels souhaits sa passion l’engage,
Et pour lui faire voir par quelque heureux présage
Que de son assistance il peut tout espérer,
Cette grande Déesse aime à se déclarer.
Une flamme qui jette un éclat qui l’étonne,
S’allume tout à coup, s’avance et l’environne.
Le spectacle à ses yeux en est trois fois offert.
Elle s’élève en pointe, elle brille et se perd.
Soudain l’âme de crainte et d’espoir combattue,
Pygmalion retourne auprès de sa Statue,
S’assied au bord du lit, la baise avec ardeur,
Et croit en la baisant sentir quelque chaleur.
Tout surpris, il remet sa bouche sur sa bouche,
Redouble ses baisers, lui prend la main, la touche,
Lui soulève le corps à moitié hors du lit,
Et partout sous ses doigts l’ivoire s’amollit.
C’est ainsi que la cire au Soleil exposée
Perdant sa dureté, devient traitable, aisée
Et prend, en se laissant tourner et retourner,
La forme que la main se plaît à lui donner.
Tandis qu’en ce succès sa juste défiance
Tient son espoir en trouble, et sa joie en balance,
Et qu’en touchant toujours, par ce sensible essai,
Il cherche à s’assurer si son bonheur est vrai,
De l’Objet si chéri qui fait toutes ses peines,
En lui tenant le bras, il sent battre les veines,
Et ne peut plus douter que d’un corps animé
Dans ce qui fut Statue il n’ait le cœur charmé.
Alors plein d’une joie à nulle autre pareille,
Il rend grâce à Vénus d’une telle merveille,
Et commence à baiser, non comme auparavant
Un visage formé par un Art décevant,
Mais une aimable Fille, en qui l’Amour étale
L’éclat d’une beauté qui n’eut jamais d’égale.
L’heureux Pygmalion, ravi de l’embrasser,
Lui marque sa tendresse et ne s’en peut lasser.
Par la prompte rougeur qui sur son front prend place,
Elle marque d’abord qu’elle sent qu’on l’embrasse,
Et haussant vers le Ciel les yeux timidement,
Dès qu’elle voit le jour, elle voit son Amant.
Vénus fait leur hymen, et s’y trouve présente,
Et le Ciel qui consent à remplir leur attente,
D’un Fils[1] après neuf mois leur accorde le don.
Il est nommé Paphus, et l’Ile en prend le nom.


[1]En fait une fille dans le texte d’Ovide.

OVIDE, Les Métamorphoses, Livre X
Traduction de Thomas CORNEILLE, 1697.



quinta-feira, maio 19, 2005

Alicerçando Imagens # - Jean-Léon Gérôme



Pigmalião e Galateia, Metropolitan Museum of Art


quarta-feira, maio 18, 2005

Alicerçando Poesia # 83 - Adélia Prado




Anímico

Nasceu no meu jardim um pé de mato
que dá flor amarela.
Toda manhã vou lá pra escutar a zoeira
da insetaria na festa.
Tem zoada de todo jeito:
tem do grosso, do fino, de aprendiz e de
mestre.
É pata, é asas, é boca, é bico, é grão de
poeira e pólen na fogueira do sol.
Parece que a arvorinha conversa.



Com Licença Poética

Quando nasci meu anjo esbelto,
desses que tocam trombeta, anunciou:
vai carregar bandeira.
Cargo muito pesado pra mulher,
esta espécie ainda envergonhada.
Aceito os subterfúgios que me cabem,
sem precisar mentir.
Não tão feia que não possa casar,
acho o Rio de Janeiro uma beleza e
ora sim, ora não, creio em parto sem dor.
Mas, o que sinto escrevo. Cumpro a sina.
Inauguro linhagens, fundo reinos
(dor não é amargura).
Minha tristeza não tem pedigree,
já a minha vontade de alegria
sem raiz vai ao meu mil avô.
Vai ser coxo na vida, é maldição pra homem.
Mulher é desdobrável. Eu sou.


terça-feira, maio 17, 2005

Alicerçando Poesia # 82- Roy Kiyooka



how to
convince you
that you
do look beautiful
that it
does fit you
that the sheen
of it sur-
rounding you
is the
shape
of intentions
both of us
wear.


segunda-feira, maio 16, 2005

Alicerçando Palavras # 67 - Jorge de Sena


À noite fui à casa do Alentejo, à reunião promovida por Aquilino e Ferreira de Castro para se organizar a Associação dos Escritores. Muita gente, e quase todos os meus conhecidos. Até a Sophia estava. Após o Sr. Vitor Santos, da Casa, que presidia, ter dado a palavra ao Aquilino e ter sido lido pela Adelaide Félix o expediente, o Ferreira de Castro propõs a lista da Comissão Organizadora, que, dizia ele, tinha de tudo, novos e velhos, de todas as cores. Muito aclamado pela "claque", fazia-se enleado para ser incluído também. O Santos, então, propõe que a lista seja aprovada por aclamação. Intervim naquela ditatorial coisa, em que só havia palamas e louvaminhas, para lembrar que era preciso saber se estavam ali escritores e quem eram, pois que de outro modo não fazia sentido a aclamação da lista. Grande burburinho, mas no fim o livro das actas passou de mão em mão para as assinaturas. Aconteceu, porém, uma anedota espantosa: levanta-se um senhor, que disse chamar-se Aquilino Mendes, e declara que, em vista de eu pôr em dúvida se estavam ou não ali escritores (o que, evidentemente, eu também fizera para desmascarar infiltrações policiais ou disturbiosas) e de ele ter sido "nomeado" escritor pela convocatória que recebera, se demitia!!! - gargalhada geral.

Jorge de Sena, Diários, Caixotim Edições, 2004



domingo, maio 15, 2005

Alicerçando Palavras # 66 - Michel Foucault 1926/1984


I dream of the intellectual destroyer of evidence and universalities, the one who, in the inertias and constraints of the present, locates and marks the weak points, the openings, the lines of power, who incessantly displaces himself, doesn't know exactly where he is heading nor what he'll think tomorrow because he is too attentive to the present.


Michel Foucault "The End of the Monarchy of Sex" from Foucault Live: Interviews, 1966-1984, tr. John Johnston, ed. Sylvere Lotringer (New York: Semiotext(e), 1989), p. 155.



sábado, maio 14, 2005

Alicerçando Imagens # 48 - Duccio di Buoninsegua 1278-1318



Maestà (painel central), tempera sobre madeira, Museo dell'Opera del Duomo, Siena, Itália.


sexta-feira, maio 13, 2005

Alicerçando Poesia # 81 - António Franco Alexandre


baralha e volta a dar

45

“Na lista dos teus fins venho no fim
de uma página nunca publicada,
e é justo que assim seja. Embora saiba
mexer palavras, e doer de frente,
e tenha esse talento conhecido
de acordar de manhã, dormir à noite,
e ser, o dia toda, como gente,
nunca curei, como previa, a lepra,
nem decifrei o delicado enigma
da letra morta que nos antecede.
Por muito te querer, talvez pudesses
dar-me um lugar qualquer mais adiante,
despir-te de pudor por um instante
e deixá-lo cobrir-me como um manto.”


António Franco Alexandre, Duende, 2002



quarta-feira, maio 11, 2005

Alicerçando Palavras # 65 - Marsilii Ficini 1433/1499



Chapter 2


Of Nature and art.



But there are in the arch of this world, two efficient causes, Nature and art. Nature daily produces and generates new things. But art by conception, making an impression of the similitudes of those things upon herself, does in an admirable manner prosecute the footsteps and delineations of Nature. So that if the wit of man do not sometime assist in some things, it is evident that Nature herself had gone astray from her operation. Or art sometimes does by the help of Nature, correct, supply and in a manner (especially in this magnificent discourse of mineral things) seems to exceed Nature. Which has already been long since consecrated to perpetual memory by those ancient Philosophers.
There are two sorts of Philosophers. Some only searching into Nature by herself, have in the monuments of their writings delivered the virtue and power which sublunary things have, as well from the elemental qualities, as from heaven and the stars; as the physicians are. And some others who have described the natures of animals, trees, herbs, metals, and precious stones. But others truly are more glorious, penetrating most sagaciously and sharply not only into Nature, but finally into the arcanum itself of Nature, and into her more inward recesses, have by a truer title assumed to themselves the name of philosopher. But because Nature produces all metals out of two things sulphur and Mercury, and has left us the superior bodies generated out of them, with the inferior bodies, certain is it is that the industrious may make the same out of her three operations, and reduce the inferior bodies to the Nature and perfection of the superior bodies.





This text is a translation of a Latin text, Marsilius Ficinus, Liber de Arte Chemica, which was printed in the Theatrum Chemicum, Vol 2, Geneva, 1702, p172-183. It is not entirely certain if this text was actually written by Ficino, or was later ascribed to him.



terça-feira, maio 10, 2005

Alicerçando Poesia # 80 - Herberto Helder


Sobre um Poema


Um poema cresce inseguramente
na confusão da carne,
sobe ainda sem palavras, só ferocidade e gosto,
talvez como sangue
ou sombra de sangue pelos canais do ser.


Fora existe o mundo. Fora, a esplêndida violência
ou os bagos de uva de onde nascem
as raízes minúsculas do sol.
Fora, os corpos genuínos e inalteráveis
do nosso amor,
os rios, a grande paz exterior das coisas,
as folhas dormindo o silêncio,
as sementes à beira do vento,
- a hora teatral da posse.
E o poema cresce tomando tudo em seu regaço.


E já nenhum poder destrói o poema.
Insustentável, único,
invade as órbitas, a face amorfa das paredes,
a miséria dos minutos,
a força sustida das coisas,
a redonda e livre harmonia do mundo.


- Em baixo o instrumento perplexo ignora
a espinha do mistério.
- E o poema faz-se contra o tempo e a carne.


segunda-feira, maio 09, 2005

Alicerçando Palavras # 64 - Eduardo Lourenço



(...)

É por comparação com a temporalidade inocente que supomos ser a da América, que a da Europa parece, senão infeliz, pelo menos incerta. Os europeus lembram-se com excesso que no próprio dia em que abordaram o Novo Mundo começaram a envelhecer. Foi um europeu – Vico – que imaginou o processo histórico como uma espiral feita de corsi e ricorsi, de avanços e regressos. Esta imagem quadra bastante bem com a necessidade da cultura europeia de voltar periodicamente sobre os seus passos. Semelhante reflexo era fácil quando o seu espaço-tempo simbólico se confundia com o espaço-tempo da história universal. Agora que o seu tempo específico a alcançou, essas tentações de retorno não a renovarão. A nossa cultura europeia – uma entre outras – encontra-se agora confrontada com os mesmos desafios que o conjunto da comunidade humana, mas não os pode vencer por nenhuma tentativa de regressar simbolicamente sobre si mesma como o fez no Renascimento e no Romantismo. Também não se pode contentar com o papel de consumidora ou recuperadora de culturas vindas de algures, unicamente para ter a ilusão de que conserva ainda a antiga hegemonia sobre o futuro. Tanto mais que ela guarda intacta a sua capacidade de invenção e renovação. Nem se vê quem a tenha mais, América inclusa. Como já não estamos como actores da História enquanto políticos no centro do mundo, imaginamos que como cultura fomos retirados da mesma história. Mas somos nós que nos retiramos fantasmando em excesso a sedução alheia e enegrecendo inconsideravelmente o nossos próprio rosto. Não nos espantemos que seja agora de fora que a imagem finita de nós mesmos nos seja apresentada. Olhemos para ela com a mesma audácia com que durante séculos em família, dilaceramos o rosto universal que nos supúnhamos. Assim entraremos de pé no tempo dos outros.


Extracto da Conferência O Nosso Tempo e o Tempo dos Outros, Eduardo Lourenço



sábado, maio 07, 2005

Alicerçando Imagens # 47 - George Grosz 1893/1959



George Grosz


sexta-feira, maio 06, 2005

Alicerçando Poesia # 79 - Seamus Heaney


Poet's Chair

Leonardo said: the sun has never
Seen a shadow. Now watch the sculptor move
Full circle round her next work, like a lover
In the sphere of shifting angles and fixed love.



1

Angling shadows of itself are what
Your 'Poet's Chair' stands to and rises out of
In its sun-stalked inner-city courtyard.
On the qui vive all the time, its four legs land
On their feet--cat's-foot, goat-foot, big soft splay-foot too;
Its straight back sprouts two bronze and leafy saplings.
Every flibbertigibbet in the town,
Old birds and boozers, late-night pissers, kissers,
All have a go at sitting on it some time.
It's the way the air behind them's winged and full,
The way a graft has seized their shoulder-blades
That makes them happy. Once out of nature,
They're going to come back in leaf and bloom
And angel step. Or something like that. Leaves
On a bloody chair! Would you believe it?


2

Next thing I see the chair in a white prison
With Socrates sitting on it, bald as a coot,
Discoursing in bright sunlight with his friends.
His time is short. The day his trial began
A verdant boat sailed from Apollo's shrine
In Delos, for the annual rite
Of commemoration. Until its wreathed
And creepered rigging re-enters Athens
Harbour, the city's life is holy.
No executions. No hemlock bowl. No tears
And none now as the poison does its work
And the expert jailer talks the company through
The stages of the numbness. Socrates
At the centre of the city and the day
Has proved the soul immortal. The bronze leaves
Cannot believe their ears, it is so silent.
Soon Crito will have to close his eyes and mouth,
But for the moment everything's an ache
Deferred, foreknown, imagined and most real.


3

My father's ploughing one, two, three, four sides
Of the lea ground where I sit all-seeing
At centre field, my back to the thorn tree
They never cut. The horses are all hoof
And burnished flank, I am all foreknowledge.
Of the poem as a ploughshare that turns time
Up and over. Of the chair in leaf
The fairy thorn is entering for the future.
Of being here for good in every sense.

quinta-feira, maio 05, 2005

Alicerçando Poesia # 78 - Gastão Cruz


Mezzo Forte



Percebes como cresce
a muralha da casa?
Ou pouco já te importa
a fronteira entre o externo
rumor e o ar que veste
o corpo quando


a velha pedra engrossa?
Respiras com a ânsia
incessante da máscara,
o rosto duplicado
que traz e que recebe
o gás da idade


O entendimento é um espaço
que decresce e renasce
em cada hausto


quarta-feira, maio 04, 2005

Alicerçando Palavras # 63 - Hans-Georg Gadamer sobre Plotino 205-260AD


LA FORZA POETICA DEL PENSIERO


È impossibile presentare tutti gli scritti di Plotino. Di quali oggetti si occupassero e in che modo venissero affrontati, può risultare soltanto da esempi. Ne sceglierò uno che, in una certa prospettiva, ritengo importante. Nella selezione che intendo operare, dovrò ricorrere a una traduzione moderna. Mi sarebbe impossibile lavorare con il testo greco, anche perché la sua prosa greca, in questo caso, non è certo facile.
È anche per questo che Plotino non ha esercitato un'influenza diretta sulla storia della filosofia. Fu solo con il Romanticismo tedesco che si produssero, per la prima volta, buone traduzioni tedesche di Plotino; naturalmente c'erano versioni latine preesistenti, ma queste sono andate perdute nella tradizione latina della Scolastica. Rimanevano però i testi greci, e proprio questi ultimi hanno cominciato a essere trasposti in tedesco in epoca romantica. Friedrich Creuzer, amico di Hegel, fu uno dei primi a tradurre Plotino. Hegel era diffidente nei confronti di Plotino; secondo questo "svevo caparbio" c'era un'atmosfera un po' troppo poetica nelle meditazioni di Plotino. Gli preferiva il filosofo che alcuni secoli dopo ne sistematizzò il pensiero, Proclo, ravvisando in quest'ultimo l'effettiva eredità della filosofia greca. Su questo non possiamo concordare. Ciò che vale per Platone, vale anche per Plotino: entrambi, con la forza poetica della loro opera, sono spiriti senza tempo; entrambi, nonostante la distanza e la diversità del nostro mondo concettuale rispetto alla loro forma mentis, sono comunque in grado di parlarci con immediatezza.
In una piccola antologia da me curata, in cui ho incluso anche Plotino, ho voluto ritradurre uno scritto, un suo testo. Mi sono sforzato enormemente di restituire almeno in parte la maestria linguistica e l'incanto poetico di queste pagine. Rileggendole oggi, mi sgomenta un forte senso di estraneità. Vorrei ora esporre qualcosa di questo scritto, a titolo di esempio. Esso è intitolato Perì fìseos, perì theorìas kai tù enòs, "Sulla natura, la "theoria" (cioè la contemplazione o intuizione) e l'Uno": sono tre temi riuniti insieme, che attraversano il pensiero di Plotino nel suo complesso. Chiarisco però subito come tradurrei oggi. Per quanto riguarda il termine natura, esso rimane intoccabile: "fìsis" è "fìsis", e "natura" è "natura"; e questa versione è accolta in tutte le lingue, ormai è definitiva! Ma per quanto concerne la "theoria", è proprio necessario conoscere il greco per sapere di che cosa si tratta. "Theoria" è… il prendere parte, come osservatori, a funzioni di culto; quindi, in sostanza, è un termine religioso: esso sta a indicare una sorta di partecipazione a qualcosa che avviene. Oggi modificherei il titolo come segue: "Sulla natura, sull'aprirsi alla contemplazione e sull'Uno".


Hans-Georg Gadamer, Plotino, Il cammino della filosofia



terça-feira, maio 03, 2005

Alicerçando Imagens # 46 - Alfred Wols 1913/1951



O moinho de vento, óleo sobre tela, 73 x 50 cm, Munique


segunda-feira, maio 02, 2005

Alicerçando Poesia # 77 - Gil Vicente 1465/1536


Cantiga


Já não quer minha senhora
que lhe fale em apartado:
Oh, que mal tão alongado !


Minha senhora me disse
que me quer falar um dia;
agora, por meu pecado,
disse-me que não podia.
Oh, que mal tão alongado !


Minha senhora me disse
que me queria falar;
agora, por meu pecado,
não me quer ver nem olhar.
Oh, que mal tão alongado !


Agora, por meu pecado,
disse-me que não podia.
Ir-me-ei triste pelo mundo
onde me levar a dita.
Oh, que mal tão alongado.


domingo, maio 01, 2005

Alicerçando Palavras # 62 - Jean Baudrillard


(...)

C'est une étrange sensation que l'on vit de retour vers le passé, où l'on voit les grands événements de notre époque être blanchis. Cela démontre quelque part que l'histoire est cyclique?...
Ah non! Non, non, ce n'est pas un cycle, ce n'est pas le retour d'un cycle, ce n'est pas une éternité qui se reproduirait. Non! C'est véritablement un retour en arrière. Ce n'est pas une régression non plus, parce que ça voudrait dire qu'elle est aussi linéaire, comme la progression. Nous ne sommes plus dans un temps linéaire, nous sommes peut-être dans un temps un peu chaotique, où il y a des récurrences, des turbulences, etc. Mais non, non, ce n'est certainement pas un temps cyclique, ce n'est plus le temps linéaire, continu et projectif de l'histoire traditionnelle.
Alors, sommes-nous encore dans l'histoire? De l'histoire il n'y a pas de définition, elle n'est pas aussi vieille que ça, il faut dire que les bases simplement théoriques de l'histoire ne sont vieilles que de quelques siècles. Peut-être que ces postulats ont cessé d'exister et, qu'à ce moment-là, c'est autre chose qui a lieu, c'est-à-dire une perte de polarité du temps, une forme aussi d'accélération. Il y a trop d'événements, et l'histoire n'est pas définie par des événements, elle se nourrit quand même d'enjeux événementiels et maintenant, avec l'information et les médias, l'événement est multiplié; il est lui aussi centrifugé et projeté dans une diffusion mondiale, il est immédiatement répercuté et immédiatement volatilisé aussi d'une certaine manière. Il perd son sens dans sa diffusion même; ça c'est l'effet médiatique, c'est un effet de disparition. L'information, contrairement à ce qu'on croit, est une sorte de trou noir, c'est une forme d'absorption de l'événement, de diffusion, de transmission, c'est l'événement à haute dilution, il perd sa concentration, donc son sens.
Pour qui les événements ont-ils encore un sens? Et cela nous y sommes confrontés tous les jours. Les événements actuels, Yougoslavie, guerre du Golfe, etc., tout le monde a su, a été informé, superinformé et en fait n'en a rien su, parce que la véritable expérience d'un événement, ou le véritable sens qu'on peut en tirer, échappe finalement à tout le monde, puisqu'il se dilue dans une forme d'information généralisée. C'est une des formes, presque chaotique de notre univers, il y a une sorte d'accélération, et l'histoire meurt par l'accélération même, par la centrifugation des événements. Elle meurt aussi par ralentissement, mais là c'est plus compliqué, parce qu'au fur et à mesure que cette information tombe dans la masse, elle fait masse elle aussi. Tous les messages que nous recevons font masse, au sens où ils deviennent une forme de déchets inertes que nous n'arrivons plus à traiter ou à recycler... (rire).
Nous avons l'impression que l'information est fluide, qu'elle passe par des réseaux, qu'elle circule, c'est sa définition. Mais en réalité elle tombe, et là où elle tombe, elle reste, parce qu'elle n'est plus transfigurée, métabolisée, etc. On parle de déchets industriels évidemment, et matériels, mais il y a un énorme déchet informatif, communicatif, informationnel, qui est aussi une masse inerte, c'est une force d'inertie en quelque sorte, qui pèse sur l'événement même. Alors, soit par accélération, soit par inertie, l'histoire a bien du mal à passer au travers, au sens où elle ne peut exister que s'il y a, à la fois bien sûr, une énergie et une volonté historique, une possibilité de représentation de l'histoire, et c'est celle-là qui nous échappe un peu aujourd'hui. Les éléments qui forment l'histoire - y compris le récit qu'on peut en faire, parce qu'il n'y a pas d'histoire sans récit, sans possibilité de la narrer, de la réciter - nous échappent un peu aussi parce que l'information s'empare trop vite de ce qui se passe, cela passe de plus en plus par l'image et non plus par le texte, ou par des mémoires écrites, ou très peu et c'est trop fugace, trop volatile et cela se dilue dans un espace qui n'est plus tout à fait le nôtre.
Nous sommes passés au-delà de ces points dont parlait Queneti, quand il disait: "Peut-être que l'espèce humaine a franchi un point aveugle au-delà duquel rien n'est plus ni vrai, ni faux, ni historique, ni non-historique, et qu'au-delà on ne sait pas vraiment ce qui se passe, on ne connaît pas vraiment les règles du jeu". Bien sûr, il y a toujours plus d'événements, mais il ne suffit pas d'événements pour faire de l'histoire; il y a de plus en plus de violence, mais ce n'est plus une violence historique comme l'analysait Marx, nous avons affaire à autre chose. Au-delà de ce point, c'est un peu la panique; d'où, sans doute, l'impulsion collective de reculer, de retourner en arrière, pour essayer de retrouver le point en deçà duquel il y avait de l'histoire, il y avait de la vraie violence, si je puis dire (rire), où il y avait de véritables événements, où il y avait... des révolutions, des contradictions, enfin des choses qui faisaient qu'il y avait un enjeu, alors que maintenant il se passe beaucoup de choses, mais l'enjeu a un peu disparu à l'horizon de l'histoire.

(...)



In, Au-delà de la fin, extracto duma entrevista a Jean Baudrillard filósofo e sociólogo.